Mme Anne-Laure Babault appelle l’attention de M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer sur la loi et la règlementation s’appliquant aux collectivités territoriales quant à l’accueil des gens du voyage. Ce sujet a été soulevé localement par des élus de l’équipe municipale de La Jarne, commune de 2500 habitants de la 2e circonscription de la Charente-Maritime. Ces élus locaux, favorables au principe de cet accueil, ont cependant noté quelques points de droit qu’ils souhaiteraient voir évoluer. En effet, selon eux, la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 prévoit dans son premier article des « aires de grand passage destinées à l’accueil des gens du voyage se déplaçant collectivement à l’occasion des rassemblements traditionnels ou occasionnels ». Les décrets d’application de cette loi ont ensuite précisé les schémas départementaux d’accueil ainsi que les dimensions de ces aires de grand passage. Leur superficie a ainsi été fixée à quatre hectares minimum. Il apparaît que cette surface importante pose des problèmes concrets de mise œuvre pour les collectivités et interroge certains principes fondamentaux de la République laïque. Tout d’abord, concernant les questions pragmatiques d’accueil, cette surface de quatre hectares apparaît surdimensionnée au regard du degré d’acceptabilité par les populations. Quatre hectares représentant environ 200 caravanes et 1000 personnes. Ainsi, les communes de moins de 10000 habitants sont très réticentes à l’idée de voir soudainement leur population croitre de 10 à 50 %. Cela pose des problèmes d’intégration et d’utilisation des structures municipales, souvent monopolisées temporairement par les groupes en stationnement. Pour cette raison, cette loi paraît difficilement applicable et dans les faits s’avère contreproductive puisque les municipalités et communautés de communes renâclent souvent à l’idée de construire des aires si vastes. Conséquence concrète : trop peu d’aires sont aménagées, les collectivités se retrouvent de fait hors la loi et les gens du voyage s’installent très souvent d’une manière anarchique sur l’espace public ou privé (terrain de football, terrains agricoles, etc.). Sur le plan des valeurs ensuite, cette superficie de quatre hectares est demandée par les missions évangéliques, afin qu’elles puissent installer de grands chapiteaux-églises, agglomérant autour de ce lieu de culte un maximum de caravanes à des fins de prosélytisme religieux. Tout ceci étant bien éloigné de l’esprit de la loi de 2000 qui précisait que ces aires étaient destinées aux « rassemblements traditionnels ou occasionnels », qui correspondent parfaitement au rassemblement du 15 août aux Saintes-Maries-de-la-Mer mais aucunement à ces églises évangéliques itinérantes qui se développent très fortement depuis quelques années dans la moitié ouest de la France. En Charente-Maritime, ces rassemblements ne sont en rien traditionnels et sont de moins en moins occasionnels puisque, pour parler du territoire rochelais, plusieurs centaines de caravanes vivent toute l’année dans l’agglomération, de commune en commune, de terrains de football en aires d’accueil. De plus si elle ne contrevient pas formellement à la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, il est légitime que les élus locaux s’interrogent sur le respect de la philosophie de celle-ci lorsqu’ils constatent qu’un investissement public serait partiellement détourné de son objet premier pour faciliter et créer les conditions d’une forme de prosélytisme religieux. Cependant, la question de l’accueil de ces populations, dans des conditions dignes et acceptables est une cause qu’ils partagent. Parmi les pistes proposées par ces élus locaux figure la remise en cause de cette obligation d’aires de quatre hectares minium, afin de permettre aux collectivités d’être moins réticentes à l’idée de construire ces aires, de favoriser une meilleure acceptabilité de celles-ci par les populations riveraines et d’éviter de multiplier le nombre de ces communautés itinérantes dressants leur églises provisoires. Aussi proposent-ils d’assouplir cette loi en permettant aux EPCI de construire la même surface d’accueil globale mais en la répartissant sur plusieurs sites plus petits. Dans le cadre des discussions avec les élus locaux de son territoire, Mme la députée interroge donc M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer sur la possibilité de faire évoluer la loi et la règlementation s’appliquant aux collectivités territoriales quant à l’accueil des gens du voyage.